Je vous offre ci-après un extrait de mon nouveau roman en cours d'écriture Une femme, deux visages :
L’adolescente est assise sur son lit, le drap remonté sur les genoux. Elle écoute une douce mélodie de Toto en faisant ses devoirs. C’est son instant de liberté, son refuge. La chambre est minuscule, à peine deux mètres carrés. Il y a juste la place pour son lit et une étagère. La porte est aussi fine que du papier à cigarette. Lorsqu’elle ôte ses écouteurs, c’est pour entendre son père et sa belle-mère se battre. Ils sont saouls du matin au soir.
Elle vit presque seule, recluse dans ces quelques mètres. Elle n’en sort que pour aller en cours ou parfois pour prendre son unique repas de la journée. Parfois seulement ! Elle ne sait jamais ce qu’il y a dans son assiette. La bouillie est immonde ! L’odeur de la pièce principale est repoussante. La crasse et la graisse se sont incrustées dans chaque centimètre carré de la pièce. Les cafards s’en donnent à cœur joie. Ils pullulent sur le formica de la table, sur la gazinière collante de graisse à frire ou sur les murs à la tapisserie grisée par les volutes de fumée. L’évier est toujours rempli, les mégots débordent. Une collection de bouteilles de bière traine devant l’entrée de la caravane. Seule sa petite chambre est propre. Elle en prend le plus grand soin.
La tête penchée en avant, les cheveux d’ébène pendant autour de son visage, elle lit la poésie qu’elle doit apprendre pour le lendemain. Un frôlement vient la déranger ! Une tâche aux reflets de caramel entre dans son champ de vision. Un des cafards a fui la crasse et le bruit de la pièce. Il s’est réfugié sur son lit. Il la regarde les antennes déployées. Elle a une mine de dégout en l’attrapant pour l’écraser entre ses doigts. Un léger rictus se forme à la commissure de ses lèvres quand elle contemple le
cadavre broyé…